Membre du LETAS, Marie Fourquier, 29 ans, évoque notamment l’apport de son oncle, Jeff Lucquin, mais aussi son meilleur et son pire souvenir de golfeuse. Interview.

Marie Fourquier

Bonjour Marie, je suis obligé de commencer l’interview sur le confinement. Comment s’est-il passé pour vous ?

J’habite à la campagne, vers Annemasse, en Haute-Savoie. Il y a un champ à côté de chez moi, où je pouvais faire des approches, jusqu’à 100 mètres. On faisait des petits concours avec mon copain (le pro Adrien Saddier). J’ai couru aussi autour de chez moi, on se challengeait à distance avec Anaelle Carnet et Lucie André. Sinon, sur le plan professionnel, j’ai fait du télétravail car l’hiver je suis aussi assistante polyvalente. Ce confinement m’a fait réfléchir. Jusqu’à présent, je travaillais à mi-temps tout en jouant sur le circuit professionnel. Peut-être vais-je désormais travailler à plein temps et ne disputer que 3 ou 4 tournois sur le LETAS en fin de saison, alors que j’avais prévu d’en jouer près du double à la base.

Vous êtes inquiète pour l’avenir du LETAS vu la situation actuelle ?

Un peu oui. Déjà cette saison, il y avait moins de tournois de prévus que l’an dernier. On a perdu des tournois comme le Jabra ou Neuchâtel. J’ai peur que la crise sanitaire et économique aient des conséquences assez lourdes sur le LETAS. C’est déjà compliqué à la base de trouver des sponsors pour les filles…

Savez-vous quand vous allez pouvoir reprendre la compétition ?

On est censé avoir des nouvelles mi-juin. Apparemment, on pourrait peut-être commencer en Suède et enchaîner une série de 12 tournois consécutifs entre fin juillet et octobre.

Dans quelles circonstances avez-vous découvert le golf ?

C’est grâce à mon oncle, Jeff Lucquin, qui avait déménagé au golf de la Valdaine, dans la Drôme. Avec ma famille, on l’a suivi et j’ai intégré l’école de golf vers 6-7 ans.

Quand avez-vous eu en tête de passer professionnelle ?

En fait, j’ai vraiment accroché au golf à partir de 15 ans, car avant je préférais jouer au tennis. J’ai commencé à faire des compètes en équipe. Une fois le BAC en poche, j’ai décidé d’en faire mon métier mais mes parents préféraient que je poursuive mes études. Du coup, j’ai suivi un BTS comptabilité pendant deux ans, puis un BTS physique, option nucléaire durant deux autres années. J’ai intégré Areva, je ne pouvais m’entraîner au golf que le week-end. J’ai gagné mon premier Grand Prix à 21 ans. Et à 23 ans, je passais les cartes du circuit avec succès, à ma grande surprise.

Vous ne vous y attendiez pas ?

Disons que je n’ai pas naturellement confiance en moi. J’y suis allé sans trop y croire ce qui, du coup, m’a sans doute enlevé pas mal de pression. Sébastien Clément, l’ancien caddie de Gwladys Nocera, a porté mon sac durant ces six jours et m’a aussi été d’une grande aide.

Que vous apporte votre oncle, Jean-François Lucquin, depuis le début de votre carrière ?

Comme on a longtemps hésité à mélanger le travail et la famille, il me conseille véritablement depuis deux ans. Avec lui, j’ai tout recommencé à zéro sur le plan technique. Il m’apporte évidemment son expérience d’ancien joueur de haut niveau. Quand on fait des « recos », je vois aussi la différence, quand il est présent. Il m’a appris à jouer plus juste, à commettre moins d’erreurs bêtes, à bien préparer mes tournois. Il sait aussi trouver les mots justes avant que j’arrive au départ du 1.

Quel est votre point fort ?

Je dirais la précision de mon jeu de fer. En fin de saison dernière, je jouais bien et touchais à chaque fois entre 14 et 18 greens en régulation.

Y a-t-il un secteur que vous travaillez en particulier ?

Le chipping, puisqu’il paraît que les filles ont moins de toucher que les garçons (rires). On fait des petits jeux à base de chipping avec Adrien, et je ne gagne pas souvent…

Quel est votre point faible selon vous ?

Le putting. A un moment, je faisais même des yips, je passais sous les trous, mes putts n’étaient pas francs. Au début de la saison dernière, mon oncle Jeff m’a dit : « tu puttes vraiment mal, tu vas essayer le grip pince. » Et depuis, je vois vraiment la différence, notamment sur les petits putts sous pression.

Quel est le meilleur souvenir de votre carrière Marie ?

Ma deuxième place, en fin de saison dernière, au Rügenwalder Mühle Open en Allemagne (derrière l’Écossaise Laura Murray). Il y avait beaucoup de monde ce jour-là. Et comme, en dernière partie, j’étais la seule des trois joueuses à ne pas avoir de caddie, le public m’a particulièrement soutenu. Lorsque j’ai rentré un chip au 14, les gens ont hurlé de joie, j’en avais des frissons.

Et votre pire souvenir de golfeuse ?

Mes deux cuts ratés deux années de suite au Jabra, à Evian, à chaque fois pour un coup. Les deux fois, j’avais un putt de 4-5 mètres que je n’ai pas réussi à rentrer. C’est forcément un tournoi qui me tient à cœur et ce sont sans doute les moments où j’ai eu le plus de mal à me relever.

Quel est votre joueuse préférée ?

J’adore Suzann Pettersen. Elle dégage quelques chose, il y a une agressivité dans son regard dans le bon sens du terme, elle a la gnaque… Il y a aussi la Thaïlandaise Ariya Jutanugarn. J’ai vu son film sur Netflix (Une femme sur le green). Elle n’a pas eu une jeunesse facile et elle en a fait une force. Elle aussi a la gnaque, mais elle dégage de la sérénité, de la sobriété. Elle respecte les gens, elle sait d’où elle vient…

Et chez les joueurs ?

Henrik Stenson. Pour les mêmes raisons que Suzann Pettersen. Il dégage quelque chose, il a la classe, un peu comme Roger Federer au tennis. Si je le rencontre un jour, je pourrais très bien réagir comme une gamine (rires) !

Quel est votre parcours préféré en France ?

Le Golf National. Il est très stressant, il vous empêche de respirer pendant 18 trous, mais c’est un très beau parcours. Et c’est celui de l’Open de France et de la Ryder Cup.

Et à l’étranger ?

Le golf d’Escorpion à Valence, en Espagne. J’adore le dessin du parcours, qui est super bien entretenu et qui sillonne entre les grands pins. Les greens sont magnifiques. Et le parcours se défend très bien.

Quel est le défaut le plus fréquent chez les joueurs amateurs selon vous ?

Ils essaient d’emmener la technique sur le parcours, et les deux ne font pas bon ménage. Quand ils tapent mal dans la balle, ils cherchent à tout prix une clé technique alors qu’ils devraient parfois juste jouer au golf et s’amuser.

Avez-vous un centre d’intérêt ou une passion en dehors du golf ?

J’aime bien jouer au tennis, j’ai même été classé 15 à une époque. Ma mère a été -15 et est prof de tennis au TC de Cruas, en Ardèche. J’y joue parfois avec Adrien, parce qu’il ne faut pas qu’il me batte à tous les jeux… (rires).

Propos recueillis par Franck Crudo