Photographe plasticienne, Marguerite Bornhauser vit et travaille à Paris. Diplômée en 2015 de l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles, elle expose dès 2019 à la Maison Européenne de la photographie, à Paris.

« Fermé pour travaux » : carte blanche à Marguerite Bornhauser

©Marguerite Bornhauser

Depuis l’automne, à l’invitation de la Rmn – Grand Palais, elle arpente les espaces du Grand Palais et pose sur le monument un regard résolument non documentaire et contemporain : dominé par la couleur, la lumière et la recherche du détail, son travail révèle l’invisible et sublime la trivialité des immenses gaines électriques qui ponctuent le chantier aux objets échoués là par hasard. Elle collecte d’ailleurs certains d’entre eux – boulons, cadenas, pancartes et billets d’entrée d’un autre temps – dans une démarche d’expérimentation plastique.

Le premier chapitre de cette carte blanche, qui se poursuivra jusqu’en 2025, regroupe 15 photos argentiques et des vidéos, que l’artiste a tout simplement prise avec son téléphone lors de ses visites. Il témoigne de la découverte et de l’émerveillement de l’artiste face au chantier, du sentiment « de faire partie d’un moment d’histoire », au coeur d’un décor vécu comme celui d’un théâtre, d’un univers quasi cinématographique. Ce premier moment du chantier étant celui du curage, il a permis à l’artiste de capter progressivement l’exhumation des couches de peintures sur les murs, de matières jusque-là invisibles, de débris au sol. Chacun de ces objets capté est présenté de manière décontextualisée, dans une approche presque abstraite et dénuée de repères spatiaux.

Extrait de la conversation entre Marguerite Bornhauser et Chris Dercon, avril 2022

CD : Est-ce que tu sais que tout ce que tu as photographié au Grand Palais, comme dans les fouilles, ça va disparaître ?

MB : Mais c’est ça, c’est cette idée là qui est magnifique et elle s’applique à la photographie de manière générale, tout va disparaitre, et il restera -un temps- les images pour les faire perdurer. J’ai l’impression de vivre un moment historique, et d’avoir une chance incroyable de voir cette évolution permanente. Parce qu’à chaque fois qu’on vient, c’est tellement différent ! Dans la vie de tous les jours, il y a peu d’occasions de voir une transformation aussi rapide et monumentale d’un lieu sur une si courte durée.

CD : Ce qui est très intéressant aussi dans ton travail, c’est que parfois, dans tes photos, il y a un thème très classique, c’est le pli. Il y aaussi le pli entre deux photos quand tu les juxtaposes en diptyque. Et chaque fois, dans les motifs, il y a le pli. Pourquoi cette fascination ?

MB : En fait, j’aime les confrontations, les oppositions. J’aime bien que les choses ne soient pas totalement en accord. Et donc le diptyque, pour moi, c’est une manière d’opposer deux choses. En fait, je crois que je n’aime pas vraiment le rapport au beau trop esthétique, trop léché, j’aime bien l’idée qu’il y ait des éléments qui créent une rupture qui pousse à s’interroger. Le pli pour moi constitue une mini fracture visuelle, des associations de formes de couleurs, qui étonnent, qui ne sont pas naturelles.

CD : Quelque chose qui cloche ?

MB : Voilà ! Et le pli, c’est ça, en fait. Quand on a un pli sur notre vêtement, on a envie de l’aplanir, et c’est ça qui m’intéresse : déstabiliser avec de petits détails, froisser le réel pour l’emmener vers quelque chose de plus étrange, de plus poétique.

l’intégralité de la conversation est à retrouver sur le site du Grand Palais

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