L’exposition présente une donation exceptionnelle, faite à la Ville de Belfort, de 45 eaux-fortes et pointes sèches composant « la caisse à remords », une suite de cuivres gravés entre 1919 et 1955, imprimés en 1960 et jamais signés par Picasso, qui n’eut jamais le temps de le faire.

Exposition « La caisse à remords, Picasso graveur »

©Musée de Belfort

« Le style, c’est quand on est mort », disait Picasso à Malraux: cette série souligne ainsi la capacité de Picasso à renouveler infatigablement quelques thèmes durant toute sa vie: le portrait, le couple, les jeux, la bacchanale. Cette série est comparée, dans cette exposition, à un ensemble généreusement prêté par le Picassomuseum de Münster (Allemagne) composé de lithographies et de linogravures, afin de présenter l’immense diversité de l’œuvre gravé de l’artiste.

Un partenariat exceptionnel

Cette exposition s’inscrit dans le cadre de la célébration du 20e anniversaire de l’ouverture du Musée d’Art moderne – Donation Maurice Jardot. Elle est également organisée dans le cadre d’un partenariat exceptionnel avec la Fondation Louis-Vuitton qui emprunte 32 œuvres afin de mettre à l’honneur Charlotte Perriand dans une exposition intitulée « Le monde nouveau de Charlotte Perriand » à Paris du 2 octobre 2019 au 24 février 2020. Au sein de ce projet, l’appartement de Maurice Jardot sera notamment reconstitué et un éclairage particulier sera apporté sur la collection belfortaine.

Pourquoi la « caisse à remords » ?

Exposition « La caisse à remords, Picasso graveur »

©Musée de Belfort

Lors de son emménagement à la villa La Californie à Cannes en 1955, Picasso dispose d’un vaste atelier où il peut déployer l’ensemble de son travail passé et présent, pour avoir une vue générale.
Au printemps 1960, Picasso examine des plaques de cuivre qu’il avait gravées plus ou moins récemment et qui n’avaient pas encore été tirées. En accord avec son marchand, Daniel-Henry Kahnweiler, le tirage devait être de soixante épreuves (cinquante pour la vente et dix épreuves d’artiste). Quelques tirages achevés par Frélaut sont signés en 1961.

Plus de deux mille feuilles sont portées à Picasso par Kahnweiler et son collaborateur Maurice Jardot. Devant cette montagne de papier, Picasso demande qu’on la mette dans un coin, préférant travailler plutôt que de se consacrer à cette tâche fastidieuse.

Lorsqu’il meurt en 1973, il ne les a pas signées. Le nom de « caisse à remords » est lié à la négligence de Picasso mais surtout au remords de Kahnweiler de ne pas avoir suivi le conseil de Frélaut et de ne pas avoir insisté pour que celles qui lui revenaient soient signées.

La place de la gravure chez Picasso

L’histoire de la « caisse à remords » est significative de la manière dont Picasso aborde l’estampe et sa diffusion. Il crée près de deux milles estampes entre 1899 et 1972, en se passionnant pour l’aspect artisanal des procédés d’impression : il a en effet un sens particulier des matériaux et des techniques, sachant les dompter afin qu’ils servent sa création.

Le plus souvent, Picasso grave par goût pour l’expérimentation et non pour honorer une commande. Malgré la possibilité offerte par l’estampe de reproduire largement son œuvre, il n’est pas non plus sensible à cette diffusion auprès d’un large public. Picasso attache davantage d’importance à la recherche graphique qu’aux questions de tirage, de diffusion et de commercialisation de ses impressions.

Exposition « La caisse à remords, Picasso graveur »

©Musée de Belfort

Les thèmes abordés dans la série

Qualifié parfois de « grand récapitulateur » (Jean Clair), Picasso est marqué par son regard vers le passé et par sa capacité à transformer ce qu’il sait et voit de l’histoire de l’art. Il n’est donc pas étonnant de considérer la série de « la caisse à remords » comme une forme de concrétisation de ce retour vers le passé et, en l’occurrence, son propre passé.

Parmi les sujets récurrents dans l’oeuvre de l’artiste, la « caisse à remords » se caractérise par un grand nombre de portraits ou d’études de visages (quinze planches) et par plusieurs illustrations de scènes de famille ou de couple (sept planches). Les scènes de plage (huit planches), avec ses baigneuses nues, sont emblématiques des années 1920, tout comme les bacchanales (six planches) sont caractéristiques de la liberté retrouvée après la Seconde Guerre mondiale.

« La gravure est le vrai voyeur »

La gravure permet une approche plus intime pour Picasso. Les différents états, à chaque étape de l’exécution, sont révélateurs de son esthétique, qui est celle d’un processus : « on ne peut vraiment suivre l’acte créateur qu’à travers la série de toutes les variations », dit-il à Brassaï. Au sujet de sa manie de tout dater, Picasso explique qu’« il ne suffit pas de connaître les oeuvres d’un artiste. Il faut aussi savoir quand il les faisait, pourquoi, comment, dans quelle circonstance ». La possibilité de faire des épreuves, à travers les « états » de la gravure, constitue un avantage par rapport à la peinture.
Plus que la peinture ou le dessin, ce medium lui permet d’exprimer son inconscient ou un profond lui-même.

« Je fais comme on fait pour un arbre : des greffes »

Exposition « La caisse à remords, Picasso graveur »

©Musée de Belfort

Si la « caisse à remords » est composée presque exclusivement de gravures sur cuivre faites à l’eau-forte, Picasso est aussi capable d’aborder l’ensemble des techniques : « le plus noble, le plus riche est l’eau-forte, sans doute. Il fallait donc enrichir la lithographie au moyen de la technique de l’eau-forte. La gravure sur bois ou sur linoléum est la plus artisanale, la moins raffinée. » Picasso ne veut pas « faire oeuvre d’art », il ressent uniquement le besoin d’exprimer les peines et les joies de sa vie, en utilisant une technique propre à chaque moment.

Picasso invente mille manières pour se sentir dans le moment présent : cette « disponibilité » active, conquérante et inventive détermine le mode de création de l’artiste.

Il faut noter l’extrême variation des styles parmi les estampes de Picasso : « Le style, c’est quand on est mort », dit-il à Malraux. Hors de question de figer la vie, on parlera donc du processus créatif de Picasso comme d’un talisman jouant le rôle d’ouvroir de la réalité vers une autre dimension.

Un choix d’estampes du Kunstmuseum Picasso de Münster permet une lecture croisée des thèmes abordés par l’artiste, et souligne combien son oeuvre gravé constitue comme un diagramme de sa sensibilité. Les thèmes du quotidien (natures mortes), l’élan de liberté (les bacchanales), les visages des femmes aimées, les admirations artistiques : à travers quelques exemples, le spectateur est le témoin de plusieurs moments de la vie de Picasso.

Exposition « La caisse à remords, Picasso graveur »

©Musée de Belfort

Autour de l’exposition

Animations et ateliers 4-6 ans

De toutes les formes

L’univers des formes est infini, et infinis sont les motifs que Pablo Picasso (1881-1973) représente ou invente sur sa toile. Dans l’atelier, les enfants imaginent un éblouissant jeu graphique et découvrent toutes les choses que nous pouvons créer en utilisant la technique du dessin sur métal à repousser.

Lundi 21 octobre, 14h30 • gratuit
Durée : 1h – sur réservation au 03 84 54 56 40 ou par mail mediationmusees@mairie-belfort.fr

Picasso, drôle d’oiseau

La légende dit que, dès son plus jeune âge, Pablo Picasso (1881-1973) termine les pattes des pigeons que son père peint. De la colombe au grand-duc, Picasso aime les oiseaux et en met partout dans son oeuvre. Cependant ses animaux de prédilection restent ceux qui peuplent l’arène espagnole : le cheval et le taureau sans oublier le Minotaure. Dans l’atelier, les enfants s’amusent à créer en volume de drôles d’oiseaux.

Jeudi 24 octobre, 14h30 • gratuit
Durée : 1h – sur réservation au 03 84 54 56 40 ou par mail mediationmusees@mairie-belfort.fr

Animations et ateliers 7-12 ans

Sur le fil

Comment représenter un visage d’un seul coup de crayon ? Pablo Picasso (1881-1973), affirme qu’en dessin il n’y a rien de plus important que la fraicheur du premier jet. Il ne le reprend pas pour ne pas gâcher justement cette spontanéité qui l’a fait naitre. Les enfants découvrent la diversité de l’oeuvre gravé du peintre et dessinent sans jamais lever le crayon de leur feuille.

Vendredi 25 octobre, 14h30 • gratuit
Durée : 1h30 – sur réservation au 03 84 54 56 40 ou par mail mediationmusees@mairie-belfort.fr

Tous publics

Visites guidées de l’exposition temporaire

Pour célébrer l’ouverture de l’exposition, venez profiter de visites guidées dédiées pour découvrir l’univers de Pablo Picasso, les techniques de gravures et l’histoire de la Donation Maurice Jardot.

Vendredi 4 octobre à 14 h , 15 h, 16 h et le samedi 5 octobre à 14 h et 15 h – gratuit
Durée : 30 minutes, pas de réservation nécessaire

Merveilles de totem

Les totems désignent dans « l’art primitif » des sculptures réunissant les différents emblèmes qui forment l’identité d’un peuple ou d’une culture traditionnelle. Les cubistes admiraient leurs formes simplifiées, tandis que les surréalistes étaient fascinés par leurs pouvoirs magiques. Dans le cadre des 20 ans de la Donation Jardot, petits et grands sont invités à imaginer un totem collectif en s’inspirant des portraits de femmes de Pablo Picasso (1881-1973).

23 novembre, 14h30 – gratuit
Durée : 2 à 3 heures – sur réservation : 03 84 54 56 40 ou par mail mediationmusees@mairie-belfort.fr

Un atelier spécifique « Merveilles de totem » est également prévu en direction de l’Ecole de la 2e Chance, avec le concours de l’artiste Pascale Lhomme Rolot et avec le soutien financier d’EDF.

Exposition « La caisse à remords, Picasso graveur »

©Musée de Belfort

Les 20 ans de l’ouverture du musée

Le 27 novembre 1999 était inauguré le Musée d’Art moderne – Donation Maurice Jardot, en présence du généreux donateur Pour recevoir sa collection privée, le choix de Maurice Jardot s’était porté sur la maison du poète Deubel dont l’échelle correspondait au caractère intimiste de la collection.

À sa demande, les concepteurs, Robert Rebutato, architecte et Pernette Perriand-Barsac, architecte d’intérieur, ont donc cherché à éviter ce que la notion de musée pouvait avoir d‘emphatique, et à captiver l’attention du visiteur en faisant disparaître les vues sur l’extérieur. Toutefois, pour pallier l’effet d’enfermement, les concepteurs ont proposé que l’une des circulations soit aménagée dans un volume en saillie, constitué de briques de verre translucides, procurant une lumière laiteuse qui rappelle la présence des espaces extérieurs. À de nombreuses reprises, Charlotte Perriand a été consultée pour parvenir au meilleur équilibre entre les impératifs du musée et l’esprit de la collection. Une longue amitié liait Charlotte Perriand à Maurice Jardot. Elle avait réalisé l’architecture intérieure de son appartement ainsi que celle de la galerie Louise Leiris.

Infos pratiques

Exposition « La caisse à remords, Picasso graveur »
Du 4 octobre 2019 au 19 janvier 2020

Exposition soutenue par LVMH

Commissariat de l’exposition : Marc Verdure, Conservateur en Chef du Patrimoine, Directeur des Musées et de la Citadelle.

Publication: catalogue de l’exposition, 48 pages, édition Silvana Editoriale. Disponible à partir d’octobre 2019.

Musée(s) de Belfort
Citadelle
90000 BELFORT

Tél. : 03 84 54 25 51
Email : mediationmusees@mairie-belfort.fr

Pour en savoir plus : https://musees.belfort.fr/