Posté le 30 juin 2017 dans Arts & culture.
Plus que quelques heures pour l’exposition « Dancing » de Catherine Benas
L’espace d’exposition particulier, composé de vitrines en verres – comme un écrin – joue un rôle dans le choix des œuvres. J’ai opté pour un ensemble d’œuvres : leporello, carnets, livres d’artistes, calques, plus ou moins liés à la danse. Certains carnets ont été composés directement pendant les spectacles, ou les répétitions, d’autres sont des réminiscences de scènes, de danseurs ou encore de projets de ballets.
J’ai abordé ce travail sur la danse par l’étude de la notation Laban – le décryptage et l’écriture -, puis j’ai collaboré au gré des rencontres avec les chorégraphes Philippe Decouflé, Herman Diephuis, Rachid Ouramdane, Alban Richard, pour expérimenter le travail sur le corps, l’espace scénique, la composition d’une œuvre chorégraphique, et sa restitution.
J’ai poursuivi ma recherche en dessinant pendant les spectacles (dans le noir !). Je me rends compte que dessiner sur le vif produit un effet d’excitation, ça unit deux comportements différents, spectateur et acteur, alliant sur le papier, entrée en scène et développement sur le carnet.
Je dessine à l’aveugle, je ne reviens pas ensuite sur le résultat sauf lorsque les œuvres sont elles-mêmes plongées dans une obscurité compacte, comme la pièce : “Les oiseaux/La nuit” de Nacera Belaza.
Pour cette pièce, j’ai du re-traduire le clair-obscur avec de la pierre noire, faire réapparaître la fine lumière de la scène, en effaçant la matière et retrouver le blanc du papier. Il en résulte une présence nouvelle de la chorégraphie, qui la révèle une deuxième fois.
Les dessins de danseurs sont des réminiscences de mouvements. Dans le droit fil de mes expérimentations d’atelier, ils ne procèdent pas directement du spectacle, mais sont une suite de travaux déjà présents dans mon évolution artistique.
A l’encre ou à l’aquarelle, ils fixent sur le papier des attitudes fugaces de formes qui fonctionnent comme des instantanés. Les images obtenues proviennent d’un rapport entre l’espace de la page et la forme qui vient s’y inscrire, il n’y a aucun modèle sous-jacent, il s’agit de restituer une impression qui s’est lentement déposée dans ma mémoire, cela s’envisage comme une performance. Il s’agit de faire apparaître une présence, pas seulement de retranscrire le mouvement.
Dans une salle obscure, l’imprécision inévitable du dessin est une donnée essentielle, car ce qui se donne à voir est en partie produit malgré moi.
Je traduis du mouvement en image fixe et depuis cette image, j’essaie de recréer un mouvement, c’est une histoire sans fin, un aller retour, dont le jeu entre les deux états est le climax, là où ça bascule.
“Longtemps j’ai cherché ton corps dans le noir, ton odeur, ta voix.
J’ai cherché ton pas, épiant chaque bruit, attendant ton apparition.
Puis, sur le papier, d’un coup de crayon, je gratte ; sur une toile d’un coup de pinceau, j’effleure, je délimite des contours, j’esquisse une présence.
Parfois je t’aperçois au détour d’une rue, ou sur une scène, tu apparais.
Devant moi, tu déploies une énergie fugace, je fouille dans le grain de mon papier, je cherche à fixer un mouvement que tu proposes. Je caresse du bout de mon crayon, j’imprime un sillon à l’aveugle. J’avance avec toi dans le noir, cherche les appuis, les tours, les petits, les grands mouvements, les expressions, les intentions.
Une sensation se faufile, une trame se cherche, ce qui reste dans l’espace quand nous nous sommes perdus de vue.
Alors apparaît une forme, un peu de son mouvement, un peu du résidu de ma mine, un peu de toi, un peu de notre mémoire et malgré moi dans l’obscurité une présence se révèle.”
Catherine Benas
“DANCING”
Exposition de Catherine BENAS
du 6 juin au 1er juillet 2017, tous les jours de 8h à 20h.
Hall du Centre Hépato-Biliaire de l’hôpital Paul-Brousse
12-14 avenue Paul-Vaillant-Couturier 94800 Villejuif
Source : http://www.tk-21.com