1927 : la saga des Mousquetaires commence. Cette année-là, le meilleur joueur de tennis du monde, René Lacoste, remporte la première Coupe Davis française avec ses compatriotes Brugnon, Borotra et Cochet. Celui que l’on surnomme déjà le «Crocodile» s’adjuge également les Internationaux de France et des Etats-Unis.

Pour mieux supporter la chaleur sur les courts, René Lacoste décide peu après de confectionner ses propres chemises. Et arbore déjà sur ses blazers une reproduction d’un crocodile, dessiné par son ami René George. En 1933, naît le légendaire polo Lacoste, le «L1212», en jersey piqué et à boutons nacrés. Pour la première fois dans l’histoire de la mode, un logo orne un vêtement commercialisé. Sur les premières affiches publicitaires vantant les mérites de la chemise Lacoste (1933), on peut lire : «Pour le tennis, le golf, la plage…».

1927: Simone Thion de la Chaume, 18 ans, devient la première golfeuse tricolore à gagner le British Ladies, la plus prestigieuse épreuve du calendrier féminin international. Pendant ce temps, au Pays Basque, son père, René Thion de la Chaume concrétise un vieux rêve : créer son propre club de golf. S’étant porté acquéreur de plusieurs terrains agricoles, il confie au renommé architecte britannique Harry S. Colt le soin de lui dessiner un tracé de championnat dans l’ancienne forêt de Fagosse, près de Saint-Jean-de-Luz, au pied de la Rhune.

Interviews réalisées lors l’Open de France 2013

Massy, Garaialde père et fils, Pascassio Le 1er novembre 1928, le célèbre Arnaud Massy – seul vainqueur français de l’Open britannique en 1907 – inaugure le parcours de Chantaco en compagnie des frères Boomer (Aubrey et Percy) et de Jean Gassiat. Massy officiera deux ans comme professionnel de Chantaco, et engagera à ses côtés Raymond Garaialde (le père de Jean). Son caractère difficile lui ayant semble-t-il fermé plusieurs portes de clubs, Arnaud Massy accepte les conditions drastiques imposées par Chantaco : ne percevant aucun salaire du club, le tarif de ses leçons ne peut excéder cinquante francs, et il n’a pas le droit de donner des ordres aux autres pros ou de gérer le magasin…

Dès 1930, année de son union avec René Lacoste, Simone Thion de la Chaume préside aux destinées de Chantaco et innove en ouvrant gratuitement l’accès du terrain aux jeunes cadets basques. Le club devient très rapidement un vivier de jeunes espoirs et offrira au golf français quelques-uns de ses champions les plus renommés : Jean Garaialde, Bernard Pascassio, Michel Tapia ou Sandrine Mendiburu.

De «Crocodile Kid» à la «Grande Catherine»

Catherine Lacoste US Open 1967 – Photo : DR archives Lacoste

Malgré sa victoire aux Championnats du Monde sur les fairways de Saint-Germain en 1964, c’est en juin 1967, quarante ans exactement après les exploits de ses parents, que Catherine Lacoste se fait vraiment un prénom en dominant les meilleures joueuses professionnelles du monde lors de l’Open américain féminin, disputé à Hot Springs (Virginie). La nouvelle a l’effet d’une bombe dans le monde du golf.

«Crocodile Kid», surnom dont Catherine Lacoste a été affublée outre-Atlantique, «fait la Une» du Figaro et la couverture du mensuel Golf World. En 1969, «Crocodile Kid» laisse la place à «la grande Catherine» qui réalise le rêve de sa vie en inscrivant, comme sa mère, son nom sur le trophée du British Ladies, au Royal Portrush (Irlande du Nord). Deux mois plus tard, elle s’impose à nouveau aux Etats-Unis, cette fois-ci lors du championnat amateur américain, au Texas, bouclant ainsi un chelem féminin (US Open-US Amateur-British Ladies) seulement réalisé avant elle par Louise Suggs et l’étonnante Babe Zaharias.

Catherine Lacoste a toujours dit qu’elle commença à exister enfin par elle même au lendemain de sa victoire à l’Open américain. Pour preuve cette anecdote qu’aimait à raconter son Crocodile de père : à son arrivée à New York, quelques jours avant l’US Open, un douanier demanda à Catherine si elle était la fille de l’ancien champion de tennis. L’année suivante, alors que René Lacoste accompagnait sa fille aux Etats-Unis, il a la surprise d’entendre un fonctionnaire de l’immigration lui demander si il est le père de la championne de golf.

Poursuivant l’oeuvre de sa mère, Catherine Lacoste a présidé le club de Chantaco trente-cinq années durant (1974-2009). Aujourd’hui une autre Lacoste, Camille, sa nièce, lui a succédé. Au regard de sa foisonnante histoire, il était tout à fait logique que Chantaco, berceau de la famille Lacoste, reçoive cet automne le 25e Open de France féminin. Le club basque confirme ainsi une fois de plus son statut de place forte du golf français.

Le berceau du golf professionnel français

Comptant parmi les plus anciens parcours de l’hexagone, le golf de Chantaco a reçu l’Open de France (masculin) en 1970. Depuis son inauguration par Arnaud Massy en 1928 le golf de Chantaco n’a cessé d’accueillir sur ses fairways le gotha des passionnés de ce sport, à l’image du Prince de Galles, de Charlie Chaplin, d’Ernest Hemingway… Encouragés par René Lacoste, plus de 100 cadets ou jeunes du club sont passés professionnels depuis sa création, fournissant au golf français l’essentiel de ses enseignants et champions de renom.

Trou N°3 – par 3 – 145 m. – Taillé dans une haie d’arbres, ce par 3 en montée n’est pas difficile pour sa longueur mais pour la difficulté de son green en pente gauche/droite.

Au pied de la Rhune

Patiné par quatre-vingts ans d’histoire, le golf de Chantaco offre des points de vue imprenables sur la Rhune, sommet mythique des Pyrénées Atlantiques. Long de 5833 mètres pour un par 70, ce parcours dessiné en 1928 par Harry S. Collt est réputé pour être technique et pour la difficulté de ses greens souvent pentus.

Dirigé par Stéphane Kerjean, et sous la présidence de Véronique Smondack, fille de Catherine Lacoste, le golf de chantaco a toujours cultivé un esprit sportif et familial qui en font tout son charme. Un charme qui se prolonge sur le parcours qui offre un aller légèrement vallonné au milieu d’une grande variété d’arbres, notamment de pins maritimes et de pins parasols, mais également de cèdres et plusieurs essences de chênes. Le retour, situé en plaine, comprend quelques obstacles d’eau. Une impression de nature et de douceur de vivre y règne comme ne manquent pas de l’apprécier tous les membres et visiteurs qui ont le privilège d’y jouer ou de traverser ses jardins à la française faisant face à l’entrée du club-house.

Un esprit sportif et familial

Plutôt court, le parcours de Chantaco convient mal aux grands frappeurs, il exige de la précision tant dans la mise en jeu qu’autour des greens. «C’est un parcours idéal pour les femmes» commente son directeur. C’est en tous les cas un avis que partagent les joueuses du Lacoste Ladies Open de France qui ont unanimement apprécié la technicité de son tracé ainsi que la ferveur du public et l’ambiance du club.

Nicolas Jeanneau